Contribution n°2 (Web)
Déposée le 27 novembre 2025 à 10h21
Contribution n°1 (Web)
Déposée le 27 novembre 2025 à 09h59
Monsieur, François COLAS, Commissaire enquêteur.
Je vous transmets ci-dessous mon avis personnel concernant le projet de centrale photovoltaïque au sol porté par Corfou Solaire. Je tiens d’abord à préciser que je suis favorable au développement des énergies renouvelables et que je considère la transition énergétique comme indispensable. Un projet solaire bien pensé, bien localisé, et respectueux des milieux naturels est une réponse essentielle au changement climatique.
Cependant, au vu des pièces du dossier, des avis administratifs et des inventaires naturalistes, je ne peux pas soutenir le projet dans sa configuration actuelle.
1. Le site n’est pas correctement justifié au regard des règles de sobriété foncière.
Le porteur présente le terrain comme une « surface artificialisée » en raison de son passé de casse automobile.
Or les documents du dossier montrent clairement que :
• des habitats ouverts fonctionnels se sont reconstitués sur place (friches, ourlets, pelouses pionnières) ;
• plusieurs espèces végétales patrimoniales y sont présentes ;
• la MRAe souligne explicitement que la qualification de surface artificialisée est contestable et interroge la compatibilité avec le PLU et la doctrine du SRADDET. (Avis MRAe, 26/06/2025)
Le SRADDET Occitanie rappelle que le photovoltaïque au sol doit être implanté en dernier recours, après les toitures, les parkings et les friches réellement dégradées. Ce n’est pas démontré dans le dossier.
2. Des impacts écologiques importants, avérés dans les documents.
Les inventaires du bureau d’étude identifient :
Flore patrimoniale
Présence dans l’emprise directe du projet :
• Cnicaut béni,
• Glaïeul douteux,
• Trèfle écumeux,
• Fumeterre en épi.
(Source : Étude d’impact – flore)
Ces espèces sont directement menacées par la destruction de leurs habitats.
Entomofaune d’intérêt
Le dossier reconnaît la présence du Caloptène occitan, espèce emblématique des milieux ouverts méditerranéens.
Les conclusions portent sur une destruction de plusieurs hectares d’habitats favorables.
Chiroptères
Le diagnostic chiroptère est bien mené, mais la MRAe rappelle à juste titre que les biais de détectabilité ne permettent pas d’exclure des sous-estimations.
En somme : le site a retrouvé une valeur écologique réelle, ce que les inventaires eux-mêmes confirment.
3. La séquence “éviter-réduire-compenser” n’est pas respectée.
Les documents fournis montrent que :
• aucune vraie variante d’évitement n’est étudiée ;
• les mesures de réduction restent faibles ;
• aucune mesure de compensation n’est proposée malgré la destruction d’habitats d’espèces patrimoniales ;
• la MRAe estime qu’une dérogation espèces protégées est nécessaire, ce qui n’a pas été anticipé.
En l’état, le projet ne respecte pas le cadre réglementaire applicable.
4. Continuités écologiques et zones humides à proximité.
Le site se situe :
• à proximité immédiate du corridor du Lirou (Trame Verte et Bleue),
• dans l’environnement proche de zones humides identifiées dans le dossier (Lirou / Orb / Canal du Midi),
• à 900 m d’une ZNIEFF de type I riche en odonates, amphibiens et avifaune.
L’implantation d’une centrale au sol en lisière de ces milieux crée un effet barrière supplémentaire.
5. Un traitement incomplet des enjeux paysagers (Canal du Midi).
La MRAe classe le paysage comme l’un des trois principaux enjeux du projet.
Le site se trouve dans la zone d’influence visuelle du Canal du Midi (bien UNESCO).
Les simulations fournies dans le dossier restent insuffisantes, et les mesures (haies, talus) ne répondent pas aux enjeux de perception à grande échelle.
6. Une alternative constructive existe : le solaire sur bâtiments.
Je souhaite insister sur un point : mon avis défavorable ne remet absolument pas en cause la nécessité de développer le solaire photovoltaïque, mais le choix de ce site précis.
Au regard :
• des bâtiments existants dans la zone (agricoles, logistiques, tertiaires),
• des toitures disponibles en périphérie immédiate,
• de l’absence de démonstration d’une recherche exhaustive d’alternatives,
il apparaît que le porteur pourrait revoir son projet en privilégiant :
• l’installation de panneaux solaires sur bâtiments,
• ou des ombrières de parking,
conformément aux priorités du SRADDET et de la doctrine nationale.
Cette solution permettrait de :
• produire autant d’électricité,
• sans artificialiser un espace où la biodiversité s’est reconstituée,
• tout en respectant pleinement la loi et les orientations régionales.
Conclusion :
Favorable aux énergies renouvelables mais attaché à la protection de la biodiversité et à la sobriété foncière, je considère que ce projet doit être revu.
En l’état du dossier, et au vu des impacts reconnus, je formule un avis défavorable.
Je reste disponible pour toute précision complémentaire.
Yann GESHORS,